Une fouine au château [feat Rowena]

Arpentant les longs couloirs du château, la directrice de l'école de sorcellerie allait regagner son bureau après avoir toisé quelques élèves vociférants qui venaient tout juste de sortir d'une salle de classe. Une fois leur journée terminée, la plupart allait se balader dans le parc ou bien traîner dans la bibliothèque avant le repas du soir. N'appréciant guère ce vacarme incessant, la doyenne les rappelait souvent à l'ordre. Autoritaire et intimidante, elle savait se faire respecter et quelques sorciers étaient craintifs à son égard. Pourtant, malgré ses airs hautains et vaniteux, Rowena restait à l'écoute et complaisante envers ses petits protégés. Beauté froide et impénétrable au regard perçant, peu d'entre eux osaient la contredire y compris les enseignants. La souveraine gouvernait le château d'une main de fer. Elle savait tout ce qui s'y passait et chacun de ses étudiants, à l'instar de certains adultes, semblaient terrifiés par elle. Il fallait dire que la menace était bien réelle, car elle restait une sorcière puissante et dangereuse pour quiconque se dressait en travers de son chemin. Poudlard était sa responsabilité et elle ne laisserait personne attaquer ces lieux qui lui avaient été confiés.

Installée sur son siège telle une reine sur son trône, elle ne tarda pas à se lever, intriguée par un bruit non loin. Ouvrant la porte d'un geste sec, la directrice découvrit un animal gisant à ses pieds avant de lever lentement les yeux vers le professeur de sortilèges. « Penniman, qu’est-ce que cette chose fait ici ? » Surprise, elle se doutait que quelque chose clochait. Wayne n'était pas du genre à la déranger pour des broutilles. Lui suggérant alors de régler cet imprévu dans son bureau, elle l'invita à entrer en s'assurant qu'aucun élève ne traînait dans les parages pour s'occuper de cela en toute discrétion.

Le bureau était une pièce circulaire, comportant plusieurs fenêtres, d'où émanait de l'une d'elles, au coucher du soleil, une lumière rouge éclatante dans toute la salle. L'apparence de cette pièce variait en fonction du directeur présent. Dès l'arrivée de cette femme aux cheveux de blé, celle-ci avait pris des teintes plus sombres, mélangeant du noir, du blanc nacré ainsi que des dorures élégantes. On y trouvait également un corbeau sur un perchoir en or derrière la porte, la pensine située dans un placard et le choixpeau magique posé sur une étagère.

Se postant derrière son énorme bureau aux pieds en forme de serres, la sorcière posa ses mains à plat sur le bois, attendant des explications. « Pourrais-je savoir la raison pour laquelle vous m'apportez un vulgaire raton laveur ? Je ne collectionne pas ces infâmes animaux qui n'ont rien à faire au sein de l'école. Si c'est un élève qui n'a pas réussi son sortilège, je suis certaine que le professeur de métamorphose saura vous aider. » Observant la bête en question, elle sentit rapidement que le brun ne l'avait pas apporté par hasard. Elle-même Animagus, Rowena comprit qu'un inconnu se cachait sous cette apparence. « Qui est-ce ? » S'approchant lentement, elle brandit sa baguette, ne laissant pas le suspense perdurer plus longtemps. « Revelio. » Le raton laveur se transforma alors en un homme ingrat, affichant un air dépité après avoir été pris la main dans le sac.

Cela ne l'étonnerait guère si l'homme en question n'était autre qu'une fouine au château qui avait été envoyée par le Ministère de la Magie ou bien par des sorciers malintentionnés. À l'époque d'Albus, de nombreux mages noirs s'étaient déjà introduits dans les couloirs en se faisant passer pour de simples professeurs. Peut-être devrait-elle songer à effectuer une légère vérification auprès du personnel afin de s'assurer qu'aucun d'eux n'étaient ici pour des raisons impures. Quoiqu'il en soit, la sécurité devra être revue pour ne pas que cela se reproduise. Comment cet inconnu avait-il pu échapper à ses filets ? Wayne avait eu une bonne intuition.

L'Animagus abject et nauséabond ne faisait plus le fier. La directrice hocha la tête lorsque son employé conseilla de l'attacher fermement. Une fois le prisonnier les mains et les chevilles liées, Rowena s'approcha davantage pour observer le visage disgracieux de son potentiel ennemi. Laissant le charmant brun s'occuper de leur invité surprise, elle attendit que ce dernier les regarde d'un air penaud avant de lui adresser la parole. « Qui êtes-vous ? Vous n'avez rien à faire dans mon château ! » D'un ton sec et glacial, le clandestin sursauta presque. « Vous avez perdu votre langue ? » Impatiente et voyant qu'il ne répondait point, la sorcière allait devoir avoir recours à des méthodes plus efficaces. Sa patience avait des limites. Se relevant lentement et silencieusement de son siège, la jolie blonde se dirigea vers son bureau pour y dénicher une potion rangée soigneusement dans un des tiroirs.

Le sérum de vérité provoquait chez celui qui l'absorbait une incapacité à mentir. Le plus puissant sérum de vérité était le Veritaserum. Ainsi, le mystérieux étranger n'aurait pas le choix de répondre à toutes leurs questions. Tendant la fiole à Wayne, elle lui lança un regard pour lui faire comprendre qu'elle l'autorisait à utiliser la méthode forte à l'égard de leur interlocuteur. « Faites en sorte qu'il parle. » Adhérant les mesures du professeur de sortilèges, elle le mettait en position de décision et d'action, ou il n'avait pas le droit de la décevoir. Mais jusque-là, il était remonté dans son estime et elle appréciait son aide et sa collaboration.

Rowena posa ses yeux émeraude sur la bille métallique que Wayne venait tout juste de sortir de la poche de leur invité surprise. Qu'était-ce donc ? La sorcière n'avait jamais rien vu de tel. Mais cet objet devait forcément signifier quelque chose puisque l'inconnu se mit à paniquer. On pouvait y lire de la peur dans ses pupilles légèrement dilatées. Il était évident qu'une personne le menait à la baguette et se servait de lui comme un vulgaire pantin. Faible d'esprit et influençable, il n'était qu'un stupide serviteur. Un autre sorcier était derrière tout cela et cet homme disgracieux n'était que le messager. Quelque chose ne tournait pas rond, quelque chose clochait. Impatiente, la directrice attendait que son subordonné fasse avaler de force la fiole qu'elle lui avait donné. Les effets ne se firent pas attendre puisqu'il se mit enfin à parler. Cela dit, ses mots n'avaient pas toujours de sens. Qui pouvait bien en être après lui ? Et pourquoi ? Les Mages d’Okaria. Pardon, les quoi ? Les deux collègues s'échangèrent un regard interrogateur. Il allait falloir que l'homme se montre plus précis dans ses dires.

Elle avait vu juste. Il était sous les ordres d'un sorcier puissant ou peut-être plusieurs. La doyenne des lieux fronçait les sourcils, réfléchissant à différents scénarios dans son esprit. Elle sentait un regard insistant posé sur elle. Toutefois elle ne prit pas la peine de tourner sa tête vers le professeur de sortilèges qui la dévisageait sans grande discrétion. Le jeune homme attendait sûrement des explications de sa part ou des théories suite aux brefs aveux de leur prisonnier. Mais la jolie blonde n'avait strictement rien à lui dire puisqu'elle n'était pas au courant de cet ordre secret. Il était rare qu'une information de la sorte lui échappe. Wayne continua alors son interrogatoire en demandant au suspect ce qu'il était venu chercher dans son bureau. Qu'est-ce qui avait bien pu l'intéresser ? Un livre, un objet ensorcelé, une potion ? La cassette !

Prise de rage, la gérante de Poudlard se leva d'un bond de son siège tout en émettant un cri strident. « C'est impossible, je l'ai détruite ! » Il était normal que le professeur ne sache pas de quoi il s'agissait. Personne ne devait l'être. « Penniman, vous allez devoir tenir votre langue. Une fois que vous serez au courant, vous devrez surveiller vos arrières et n'en parler à personne. Est-ce bien clair ? » Il avait le droit de savoir. Le fusillant du regard, il avait plutôt intérêt à acquiescer. Lui prenant le bras afin de l'attirer vers un coin plus sombre de la pièce, elle s'assura que la fouine ne puisse pas entendre leur conversation. « Cette cassette est un objet de magie noire extrêmement rare et dangereux. Il abrite une entité sombre qui détruirait tout sur son passage si jamais elle venait à s'évaporer de la boîte. Cela ressemble à un Obscurus mais non relié à un sorcier. Cet écrin a été trouvé il y a quelques années dans l'ancienne demeure de Vous-Savez-Qui. Personne ne savait son existence jusqu'au mois dernier. Une clé a également été retrouvée à Little Hangleton. Des rumeurs stipulent que les Gaunt l'aurait cachée durant de nombreuses années. J'ignore si cela était pour une protection ou pour obtenir un pouvoir absolu. Des mages noirs ont longuement fouillé les quartiers londoniens sans jamais la trouver. Et désormais, ils ont besoin de la cassette pour l'ouvrir. » Ne souhaitant pas se justifier sur le fait qu'elle l'avait en possession et de comment elle l'avait obtenue, la directrice était persuadée que l'objet en question n'était plus effectif. Mais visiblement, ses actions pour s'en débarrasser n'avaient pas été suffisantes. Une taupe avait su que la cassette était dissimulée ici et qu'il était nécessaire de la dérober. Des mages noirs étaient bel et bien de retour, plus puissants que jamais. Mais pour qui travaillaient-ils ? Les Mages d’Okaria ? Non, ce nom ressemblait plus à une secte. Ils avaient peut-être une importance, cependant quelqu'un de bien plus malveillant se cachait derrière cette histoire. Étaient-ce des anciens partisans du Seigneur des Ténèbres ou une nouvelle menace plus grande et ambitieuse ? Même le Ministère de la Magie n'avait pas un seul indice. Cela était un pur mystère.

Formés au cours des années suivant la chute de Grindelwald, vaincu par Albus Dumbledore en 1945, les mages noirs constituaient un groupe de sorciers et de sorcières partisans du célèbre et redoutable Seigneur des Ténèbres. Ils étaient convaincus, comme leur maître, de la supériorité des individus dits de « sang-pur » sur les sorciers et sorcières nés-moldus, et avaient pour objectif d'instituer, par le biais du Ministère de la Magie, un nouvel ordre basé sur la peur et la terreur. Ils étaient ainsi amenés au fil des années à éliminer d'importants responsables du gouvernement ou des membres de l'Ordre du Phénix, une organisation fondée à la fin des années 1970 par l'ancien directeur de Poudlard dans le but de contrer leurs agissements. Ces nouveaux sorciers étaient-ils semblables à leurs aînés ? Suivaient-ils le même dessein ? Si c'était le cas, il était possible de les démasquer grâce à la marque des Ténèbres qu'ils portaient tous sur l'avant-bras gauche. Il s'agissait d'un signe distinctif créé par Vous-Savez-Qui afin de pouvoir convoquer ses fidèles instantanément ou de permettre à ces derniers de l’appeler. Mais qui était le nouveau successeur encore plus menaçant et puissant ? Était-il caché parmi la population ?

Wayne fut empli d'interrogations dès lors où la doyenne lui indiqua la provenance et l'utilité de la mystérieuse cassette. « Oui, il y a bien eu des photographies prises au cours de ces recherches. Cela est confidentiel, veuillez à ne jamais les mentionner à qui que ce soit. » Maintenant que le professeur de sortilège était au courant, il allait devoir tenir sa langue dans sa poche. De nombreux bruits de couloir circulaient d'ores et déjà entre élèves, il n'était donc pas nécessaire d'en rajouter.

Après avoir fouillé dans la bibliothèque située derrière son bureau, Rowena tendit au sorcier une ancienne photographie. Celle-ci était légèrement animée, dévoilant seulement l'éblouissement de l'appareil suivi d'un léger grossissement vers le centre de l'image. La directrice de l'école se douta que son acolyte avait remarqué le symbole du serpent sur la cassette. Il était plus qu'évident qu'elle avait appartenu de près ou de loin à Tom Jedusor. Les Mages d'Okaria avaient la clé et la sorcière avait l'objet convoité. Tôt ou tard, ils allaient venir le chercher.

Se retournant brusquement vers Monsieur Penniman, la responsable des lieux le fusilla du regard. Comment osait-il lui donner un ordre ? Ce n'était pas à lui de lui dire de léguer cette affaire au Ministère. Son côté autoritaire reprit le dessus et n'allait pas gérer cela de la façon qu'il espérait. Elle avait une bien meilleure idée qui permettrait de moins attirer l'attention des journalistes afin de garder cette intrusion secrète. Elle ne pouvait pas laisser croire à une moindre faille de sécurité. « Non. J'ai des connaissances qui pourront se charger de lui. Je ne fais pas confiance au Ministère pour le moment. » Bien sûr, elle parlait de l'Ordre du Phénix qui venait tout juste de se reformer dès le lendemain où le retour des mages noirs avait été officialisé. Mais ça, elle omit de lui dire. Le brun n'avait pas besoin de tous les détails. Puis avec ses relations au gouvernement, des Aurors prendront la suite après quelques questionnements supplémentaires auprès de la fouine qui avait réussi à s'introduire dans le château. « Très bien, je vous suis. » Une fois son bureau rangé, la sang-pur ouvrit la porte et jeta un coup d’œil dans le couloir. « Rejoignez-moi après le dîner. Personne ne doit se poser de question. » Certains étudiants se dirigeaient déjà vers la Grande Salle pour leur repas du soir. Tous les professeurs y étaient également attendus. Il était donc plus judicieux que les deux adultes se retrouvent plus tard dans la soirée où personne ne les chercherait et où leur présence sera moins requise. Le laissant s'éloigner, Rowena claqua la porte et transplana avec le prisonnier dans un lieu excentré de l'école. En seulement quelques minutes, c'était comme s'il s'était simplement volatilisé. Ce n'était que le début d'une potentielle grande bataille qui pouvait surgir à tout moment. Une rébellion se formait dans l'ombre. C'était comme si l'histoire se répétait.